L’ICANN, ange ou démon ?

L’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) se définit comme étant « une organisation de droit privé à but non lucratif ». Cet organisme, créé en 1998, est chargé d’attribuer les IP (Identifiants Internet) et de gérer les noms de domaine ainsi que le contrôle des extensions au niveau mondial. Zoom sur les premières questions soulevées par la 32ème réunion internationale de l’ICANN (se tenant du 23 au 26 juin à Paris).

Libéralisation de l’utilisation des alphabets dans le nommage internet ?

L’ICANN en parlait depuis l’an dernier…Selon les premiers échanges de la réunion d’hier, les caractères accentués feraient leur entrée dès le premier semestre 2009 dans l’univers des noms de domaine, laissant libre cours non seulement à l’alphabet utilisé actuellement (alphabet latin) mais également aux alphabets cyrillique, asiatique, arabe etc.
La Chine a récemment permis l’utilisation des caractères chinois dans les noms de domaine en .cn, rendant Internet accessible à toute sa population (dont à peine le 1/5 connait l’alphabet occidental !). Cette action de la Chine est-elle le point de départ des révolutions impulsées par l’ICANN ? C’est ce que confie, dans un récent article, la société Ariase, spécialisée dans le conseil et l’analyse des réseaux Internet.

2. Nombre illimités d’extensions?

Libéralisation des extensions de noms de domaine ?

Parallèlement à cela, une deuxième révolution est en marche et fait grincer des dents les professionnels de l’Internet et du nom de domaine. Selon une récente déclaration du Président de l’ICANN, « dès le premier semestre 2009, aura lieu une libéralisation des extensions génériques sur Internet ». Autrement dit, n’importe qui pourra créer l’extension de son choix, et ce aussi facilement qu’un dépôt de nom de domaine ! Ainsi pourrait-on voir naître le .gratuit, le .nom, le .bureau et autres extensions tout aussi originales.
L’ICANN émet toutefois des réserves quant aux conditions de cette ouverture du marché aux « néophytes ». 4 premières règles ont en effet été énoncées :

  • Le respect du droit des marques (un « .google », « .microsoft » ou « .cocacola » ne pourraient être déposés et utilisés que par les détenteurs de marques).
  • Les imitations des extensions existantes ne seront pas admises (impossible dans ce cas de déposer le .nett, le .com ou le .infos).
  • Le respect de l’identité d’une communauté reconnue par ses pairs, l’extension restera propriété de la dite communauté (ne pourront être proposés par Quidam le .chrétien, .catho, ou encore le .masai).
  • L’attribution d’une extension troublant l’ordre moral ou public sera automatiquement rejetée.

3. l’ICANN ange ou démon?

Motivations de l’ICANN : calcul ou relance d’un marché frôlant la pénurie ?

Si l’annonce de ces grandes mesures a laissé certains sans voix, elle fait également beaucoup de bruit dans la presse et chez les professionnels de l’Internet !

Quand certains parlent d’un calcul pur et simple de l’ICANN, qui souhaiterait tirer profit de la multiplicité de noms de domaine créés (chaque nom de domaine vendu rapporte à l’ICANN, organisme défini comme association à but non lucratif, cherchez l’erreur…) ; d’autres pointent du doigt les risques de cybersquatting accrus, la multiplication des conflits dans l’attribution des nouvelles adresses avec pour seul gagnant : le plus riche ou le plus fort juridiquement parlant.

Car l’ICANN ne souhaite pas s’arrêter à la libéralisation et estime que si conflit il y a entre deux entités qui souhaitent déposer la même extension, les entités auront 3 mois pour régler leurs différends à l’amiable. Si au bout de ce laps de temps, aucune décision commune n’est prise, l’ICANN entend mettre l’extension aux enchères. Mais qui contrôlera et vers quelles juridictions pourront se tourner les personnes lésées ?

D’autres sources voient en ces nouvelles mesures une relance du marché des noms de domaine, actuellement saturé (ex : peu de .com restent disponibles), avec des créations d’adresses internet à perte de vue… Cependant, tout tend à faire penser que la politique de pénurie de nommage internet a été instaurée par l’ICANN, elle-même, en vue d’orchestrer l’envolée des ventes de noms de domaine.

En tout état de cause, le débat de la libéralisation des noms de domaine est ouvert et nous vous tiendrons informé au fur et à mesure des négociations.

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Journaliste de formation, j'occupe actuellement la fonction de rédacteur au sein du réseau des sites Internet de services aux entreprises du groupe Libbre. Je peux justifier d'une expérience de six ans dans la presse quotidienne angevine au sein de trois quotidiens : la Nouvelle République, Ouest-France puis le journal majoritaire en Maine-et-Loire : le Courrier de l'Ouest (2007-2009).

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